Les vignes seront-elles les prochaines victimes du changement climatique ?
Une récente étude vient de démontrer que le changement climatique a un impact non négligeable sur les vignes du monde entier. Un scénario certes inquiétant, mais qui peut être dédramatisé, car l'adaptation est déjà en marche.
Un scénario alarmant
Une équipe de chercheurs américains, chiliens et chinois viennent de publier un article intitulé « Climate change, wine, and conservation » dans la célèbre revue scientifique « Proceedings of the National Academy of Sciences ». L’article en question prédit qu’un quart et trois quarts des surfaces des neuf grandes régions viticoles actuelles ne seraient plus adaptés à viticulture d’ici une quarantaine d'années. Ainsi, la quasi-intégralité de l'Europe du Sud et les vignobles de la vallée du Rhône, de Bordeaux et du Languedoc-Roussillon seraient touchés. La vallée de la Loire et l'Alsace pour leur part, ne sont pas dans la liste. Serge Delrot, directeur scientifique de l'Institut des sciences de la vigne et du vin (ISVV) à Bordeaux, au vu de ces résultats, s’est empressé de déclarer : « Nous ne sommes pas du tout d'accord avec cette vision catastrophiste. Si l'on suit le raisonnement des auteurs, depuis 2000 déjà on ne devrait plus avoir de syrah en Languedoc, de sauvignon blanc à Bordeaux, de riesling en Alsace ou de pinot noir en Bourgogne ».
Hervé Quénol, chercheur au CNRS et spécialiste de l'analyse climatique à l'échelle locale, en réponse aux notes avancées a déclaré : « L'impact du climat à un niveau très local est énorme sur la vigne. Entre le bas du coteau et le haut, vous avez une différence de 2 degrés Celsius. Soit la variation qu'on nous promet d'ici à 2050 ». En effet, le chercheur suit actuellement de près plus d’une quinzaine de vignobles dans le monde qu'il a affublé de capteurs qui permettraient de mesurer ces variations.
Toutefois, la réalité est là, le changement climatique est bien d’actualité. D’ailleurs, en Afrique du Sud, on cultive désormais la vigne en altitude tandis qu’en Europe, les vignerons ont constaté que la maturité des raisins arrive de plus en plus tôt.
Un paramètre de taille : l’homme
Les auteurs de l'étude ont oublié de prendre en compte un paramètre important, l’homme. Jean-Marc Touzard, économiste et chercheur à l'Inra et qui co-anime le projet « Long term impacts and Adaptations to Climate Change in Viticulture and Enology » (Laccave), qui a pour objectif d’observer les conséquences du changement climatique, intervient à ce sujet en déclarant : « L'histoire de la vigne depuis cinq mille ans est celle d'une adaptation perpétuelle. On ne peut pas appliquer des modèles climatiques à la vigne comme s'il s'agissait de n'importe quelle plante ». Jean-Marc Touzard affirme que « L'homme a de multiples stratégies d'adaptation » et qu’il arrivera toujours à perfectionner ses pratiques. Il estime que l’effeuillage promet divers avantages. En effet, avec la photosynthèse, les feuilles arrivent à produire du sucre et protègent dans la foulée les raisins des rayons du soleil. Il a également déclaré qu’il parait intéressant de replanter en orientant les rangs de vigne par rapport au soleil de manière différente.
Un arrosage au goutte-à-goutte
Serge Delrot trouve qu’il est encore assez tôt pour dire que l’on connait chaque fonctionnement de cette plante. Il a d’ailleurs ajouté : « Dès lors que l'on comprendra ce qui se passe, on sera mieux à même d'orienter la sélection des plants et les pratiques agronomiques ». Si l'irrigation est interdite en France pour les appellations d'origine contrôlées (AOC), le Languedoc est en train d’y réfléchir. Par ailleurs, les auteurs de l’article craignent de l’impact de la vigne sur les ressources en eau. Jean-Marc Touzard suit la même logique en déclarant : « Ce sera de l'arrosage de précision avec du goutte-à-goutte. Il sera de toute façon très limité étant donné le coût de ces installations ».
Les chercheurs avancent également l’idée d’adopter des cépages à la maturité plus lente outre les techniques de désalcoolisation partielle du vin. En effet, cela devrait permettre d’éviter les vendanges lors des périodes de grande chaleur. Ainsi, l'Institut des sciences de la vigne et du vin vient de planter plus d’une cinquantaine de cépages différents venant du monde entier. Ces plants leur permettront d’observer l’évolution des caractéristiques (vigueur, composition biochimique, date de floraison, qualités organoleptiques, etc.) sur les dix prochaines années.
Source : vos économies d'énergie.fr